Récits du 24 août 2003, Aigneville


Dimanche 24 août :

Etaient présents, Fred Bergey, Antoine Saraf, Michel Moussier, Romane Oughlissi et moi.
Vent assez fort avec rafales. Remorqués difficiles. Romane participe à l'assistance au décollage, bien nécessaire compte tenu du vent. Fred parcours 116 km, Antoine 85 km, Denis 67 km.

Michel se lancera dans la récup. D'abord Fred, puis Antoine enfin moi après de nombreux détours car le coin est réellement paumé et l'absence de carte n'aide pas. L'endroit est digne d'un tournage de film. La propriété est bordée de hautes haies, j'y trouve deux étangs, des poissons, des canards, des chiens. Claude, le propriétaire des lieux pratique la chasse à cour à pied. Après avoir essayé d'autres maisons manifestement désertes, c'est le seul endroit du coin où je peux trouver quelqu'un qui pourra me prêter un téléphone car ici le portable ne passe pas.
Après le coup de fil et une bière, c'est le lâcher des chiens. La meute cours à toute allure vers l'étang pour voir s'il n'y aurait pas un canard à béqueter pendant que la maître est occupé à refermer les portes de l'enclos. Les chiens nagent avec ardeur et se délectent de ce moment tant attendu. Madame distribue des gâteaux et Monsieur grogne, prétendant qu'elle lui prête moins d'attention qu'aux chiens.
Arrive 9h, Fred appelle : "Je suis récupéré, on arrive".
L'apéritif pris on prépare les tomates farcies.
Nouveau coup de fils, explications au téléphone, confirmation des coordonnées GPS. Comprenant les difficultés pour trouver l'endroit, les propriétaires proposent d'aller à la rencontre des récupérateurs : "Ils devraient arriver par là". Mais la récup au GPS ne suit pas du tout la logique habituelle et la récup est sur les lieux quand nous les attendons plus loin.
Nous finissons par nous y retrouver. "Vous n'allez pas partir sans boire un petit verre". Michel hésite.
Claude : "Voilà une hésitation qui en dit long".
Tout le monde entre. Apéritif, tomates farcies, 2 bouteilles de bon Bougueil, compote de pomme maison, rires, chaude ambiance. Entre autres confidences, Claude avoue "J'ai eu plus de satisfactions avec mes chiens qu'avec les femmes".
Pour finir la soirée Monsieur et Madame donnent du cor. D'abord un classique puis dans la foulée "Les petites femmes de Paris".
S'orienter pour sortir de cet endroit perdu n'est pas plus aisé. Pas de panneau indicateur si ce n'est un grand panneau de la taille d'un panneau publicitaire avec le nom des lieus dits : la petite truie, la grande truie... Les étoiles sont d'un grand secours pour retrouver notre chemin.


Denis PETERMANN

 

Le week-end avait commencé comme un pèlerinage. Après une longue montée vers les cieux, la fine équipe avait tiré des bords toute l’après midi pour atteindre la cathédrale de Chartres comme d’autres le faisaient autrefois sur les genoux depuis Paris.

La sélection naturelle ne permit pas à tous les pèlerins d'arriver. Certains retournèrent à Aigneville d'autres, épuisés, finirent au sol. On ne les revit pas le lendemain.

Dimanche, la journée commença par un constat de Denis : "Quant la bouteille d'eau pleine tombe comme ça de la table de pique nique, c'est qu'il y a du vent ….! ". Le même déclarera plus tard dans la journée : "Je contourne le trou de bleu par l'Est ! ", phrase lourde de sens qui résonne encore dans nos têtes.

Après une longue contemplation du vent la journée de Delta commença par un stage de demi-remorqués présidée par Denis. Toutes les techniques y passèrent, je pète le fusible, je retourne l'Ulm pour qu'il me laisse toute la ligne, je me largue trop bas pour accrocher.
Tout fut exploité, rien n'échappa à l'essai.

La journée était donc déjà avancé quand nous décidons de nous faire un ami de ce vent jusque là ennemi.

Je pars en premier et après que pour être sur de n’avoir rien omis les copains testent à nouveau les techniques du demi remorqué, Antoine et Denis partent à ma poursuite.
Très vite je constate que le vol se fera au cap 240, ceci restera un mystère pour Antoine dont le MLR acheté au rabais ne connaît pas ce genre d’informations.

Le vol fut magnifique, la Beauce défilait sous notre vol elliptique. Les thermiques s'ils n'étaient pas toujours généreux étaient franchement dérivants.
Le vol était égayé de quelques déclarations à la Radio : " Je suis au-dessus du champ rainuré " ou " les clés de ma voiture sont dans ma poche " ou encore " Antoine : "je suis à 300 mètres, tout va bien !".

Les kilomètres défilaient et étaient annoncés à la radio 30-40-60 kms en insistant sur le Cap 240 pour essayer de susciter l'envie à Michel de se lancer en récup. El récupérator comme il se fait maintenant appeler dans sa rigueur logisticienne repliait et son aile et l'ULM avant de se lancer à notre poursuite.

Je pose à 116 kms , mon poursuivant aux dents longues Antoine dont la rage qui l'animait pour me rattraper n'avait d’égale que celle qu’il avait déployée dans le traitement de sa patiente toute la nuit précédente, finit au km 84.
Denis tombe dans un trou de bleu, sans doute mal contourné, à 67 kms.

Nous nous posons tous épuisés et heureux, sans réaliser dans notre insouciance béhate que le meilleur est encore à venir : La récup, ses turpitudes, ses approximations, ses retrouvailles, ses rencontres et son Cor de Chasse.

El récupérator décide de nous attaquer à revers et se lance à donf sur l'autoroute pour me retrouver en premier, bien chargé de bière à La Chapelle aux Choux.
Nous décidons de prendre le chemin des écoliers pour retrouver Antoine un peu desséché qui avait marché une heure pour voir le Café fermer comme on va admirer un coucher de Soleil.

Il fallait être trois pour pouvoir attaquer la vraie difficulté de la journée : Trouver Denis ; avec pour toute indication qu'il était dans un trou de bleu !
En bon crossman il avait décidé d'atterrir sur la seule page qui manquait à l'Atlas routier.
Deux heures de GPS plus tard son aile était retrouvée et aucune hypothèse n'était écartée quant au sort du pilote.
On apprenait plus tard qu'il avait échappé aux tirs à balles du propriétaire des lieux mais pas au supplice de l'entonnoir à Bourgueil.

22H, la radio qu'on croyait morte grésille d'une voix lointaine mais connue.
La troisième déclaration de la journée nous est livrée : "Comme il faisait noir, j'étais partie à votre rencontre… " Personne n'osa relever que c'était dans la direction opposée à celle par laquelle nous venions.

Dans le sombre de la nuit nous aurions pu remarquer que la maison ressemblait à celle de l'ogre si souvent décrite dans les contes. La proposition de la tomate farcie, assez inhabituelle, ne nous a cependant pas alerté et avec une réticence polie nous nous laissons conduire dans la maison.
Ensuite tout va très vite, les bouchons de Bourgueil qui sautent, les récits de chasse, le massacre du grille pain. Le jeune Antoine que l'on tente d'engraisser à coup de compote finit en pleurs devant le concert de Cor de Chasse.

Minuit, magnanime, on nous laisse partir non sans avoir lâché : " dans ma vie j'ai eu plus de satisfactions avec les chiens qu'avec les femmes ! ". Aucun doute, nous avons bien rencontré un chasseur.

Est ce l'émotion de la récup ? les exploits de la nuit précédente ? est ce d'avoir respiré du nuage ? Antoine s'endort immédiatement.
Les autres pas, dans son relâchement il a enlevé ses chaussures !

01H30 Aigneville, nous retrouvons ma voiture laissée ouverte avec tout le matos par EL RECUPERATOR, dans son empressement de servir .
Personne ne propose de re-monter l'ULM pour essayer un petit remorqué de nuit, alors, nous rentrons.

Bons vols et gare aux trous de bleu.


Frédéric BERGEY